Leurs regards se sont croisés, disons que se sont plutôt leurs sourires qui se sont reflétés l'un dans l'autre comme deux magnifiques miroirs réfléchissants ; quels fantastiques échanges de lumières, de bonnes manières, des bises effleurant un brin sensuellement des joues pomme d'amour, un comment vas-tu à un je vais bien merci, suivit de deux éclats de rire, pas pour rien, mais juste pour leurs plaisirs communs.
Il semble que ses deux-là ont en partage quelque chose de très particulier, de sincère et profond ; ce n'est qu'un avis...
Lui, le garçon, il a l'air intéressant avec une belle allure et ne semble pas fier du tout. Il paraît même qu'il est brillant dans pas mal de domaines ; mais elle, quelle exquise créature, quelle beauté, quel charme, toujours bien mise et ravissante à souhait. C'est vrai qu'elle a l'excellence pour plaire, pour rendre un homme fou amoureux et tendrement heureux !
On peu dire, à les voir qu'ils forment un beau couple.
Mais voilà, il a quelque chose de grave à lui dire ; est-ce que c'est enfin une déclaration d'amour, est-ce qu'il va faire un long voyage, est-ce qu'il a des ennuis d'argent, de santé ?
D'abord, il lui a pris la main du côté cœur, puis l'autre, ensuite il a plongé son regard dans le sien, les yeux dans les yeux, comme s'il se jetait dans une faille abyssale, dans un abyme sans fin et tout à coup d'une voix un peu maîtrisée, mais le verbe est quand même pathétique ; écoutons ce que l'univers entier va entendre en écho sortir de sa bouche :
"Certaines nuits portent conseil, d'autres, tant mieux ou hélas ! désensorcellent et leurs matins augurent des lendemains qui ne ressembleront pas du tout aux meilleurs déjà vécus sur terre.
Au cœur de la nuit dernière, le mien de "cœur" a pris une décision majeure qui a mis plus qu'un bémol a mes sentiments pour toi ; tu devais te douter que j'avais au moins le béguin pour toi ?
Je ne suis pas dans l'amertume, loin de moi l'idée ainsi que l'envie de t'attrister, alors surtout toi aussi ne te chagrine pas pour moi, ne pleure pas non plus sur moi, ça mouille et vu le temps qu'il fait...(éclats de rire en duo qui montent vers un aigu maximum, se transformant en fou-rire, puis tombent dans les graves avant de s'arrêter net pour le début de la phrase attendu) J'ai décidé depuis la nuit dernière de ne plus être amoureux de toi".
Quel silence ! Il est dit que "le silence est d'or", d'autres sont apaisants, mais celui-ci est lourd, très lourd, lourd comme un temps orageux, un temps de fin de vie, de fin du monde.
Puis, sortant de cet instant apocalyptique, prenant aussi l'univers à témoin, une voix féminine, tristounette et bizarrement belle, douce, agréable à entendre ainsi qu'à réentendre, on dirait une musique interprétée dans des accords mineurs par des amis de Mozart ; écoutons :
"C'est que depuis la nuit dernière, mon cœur qui ne m'a jamais trahit à ce jour avait pris une décision majeure et j'étais venue te dire que j'étais amoureuse de toi..."
Quand la même nuit ne porte pas les mêmes conseils, hélas !
Amarildo Guy LABEROL